jeudi 20 août 2009

Bavardages ante-Girona


Un matin, j'ai décidé d'aller à Girona.
Je me suis réveillée comme je m'étais endormie: sur la banquette arrière de la voiture. Et la voiture était là où je l'avais laissée: sur un parking coincé entre une plage et un camping.
Avant de partir pour Girona, j'ai pris une douche sur la plage (impression grisante de débaucher l'eau et de posséder la plus grande salle de bain du monde... un luxe, tant qu'on n'essaie pas d'y passer l'aspirateur), et un petit déjeuner sur le sable en regardant des vagues grandes comme vous et moi (peut-être surtout comme vous, parce que comme moi, ce n'est guère impressionnant) s'écraser sur le sable à grand renfort d'écume et de bruit (un bol de céréales avec du lait: 4/10 sur l'échelle du plaisir. Le même bol de céréales avec du lait sur une plage en plein accouchement de vagues: 7/10). Et ça m'a pris trois quart d'heures.


Comment expliquer alors que la jeune française dont la voiture blanche était garée sur le parking coincé entre la plage et un camping ne soit donc partie qu'une heure plus tard?

Le talent:

Pour commencer, par un tour de force digne de mon nom j'ai réalisé devant la porte de la voiture que j'avais toutes mes affaires de douche et de petit déjeuner, et mon "4ème appareil photo d'occasion en trois mois", mais de clés de voiture, point pantoute. La bonne nouvelle, étant que mes papiers, mon argent, mon chat, mon téléphone, mon ordinateur, les réserves de nourriture, les vêtements, les livres, etc, étaient en sécurité dans la voiture fermée.
Après avoir loupé quelques battements de cœur en regardant la vaste étendue de la plage et maudit une certaine "moi-même" jusqu'à la quinzième génération (avec un peu de chance, mes enfants qui auront cinq bras et deux nez me pardonneront de les avoir maudits pour une histoire de clef si je leur fais du gâteau au chocolat à tous les desserts jusqu'à leur majorité...), je me suis mise en mode "aigle et sioux" et j'ai refait le chemin à l'envers, en tentant de reconnaître mes empruntes dans le sable et en balayant d'un œil aigu l'horizon uniforme. Bien sûr, la chance de retrouver une paire de clefs sur une plage est plus ou moins égale à celle de retrouver un grain de riz dans un silo à blé, ou sa bonne humeur dans un métro bondé à 7h30 après trois quarts d'heure d'arrêt inexpliqué entre Saint Michel et Châtelet. C'est là que la différence est criante entre un jour où on peut jouer au loto et un jour où il vaut mieux se contenter de regarder Matrix, car tel mon pull beige quelques mois plus tôt, les clefs attendaient avec une certaine angoisse mêlée d'incompréhension à la place où je les avais négligemment laissées tombées un instant plus tôt.

Et c'est ainsi que cette petite histoire put ne rester qu'une anodine péripétie, et ne gagna pas le grade de péripétie majeure de la journée, ou péripétie ayant déterminé l'avortement prématuré de mes vacances dans des conditions pathétiques.

Le coup des clés: Vingt minutes

En revenant vers la voiture, un sourire triomphant aux lèvres, j'ignorais que j'aurais pu garder ce sourire triomphant pour d'autres triomphes.
Prête à partir vers Girona, je tournai la clé dans le moteur pour passer de la théorie à la pratique, et voici le dialogue qui s'engagea alors entre la voiture et moi:
Voiture: " "
Moi: ?????????????????????????
Voiture:
Moi???????!!!!!!!!!???????????????????
Voiture:
Moi: Mais, euh!!!!!!!! Pourquoi? Pourquoi?
Voiture:
Moi: Tu devrais avoir honte de me dire ça maintenant!!
Luna: Miarrrrou? (Luna roule encore les "r")
Voiture:
Moi: On va voir si tu oseras le répéter devant témoins!"

Un vrai dialogue de sourds.

Je sortis et tentai d'impressioner la voiture en ouvrant le capot. Sa réponse: " " pourrait se traduire par: "Dejame reir!!!!"
Il fallut recourrir à des moyens plus draconiens.
Dix minutes pour réunir une équipe d'hommes compétents.
Dix minutes d'auscultation pour en venir à la même conclusion que moi: rhume de batterie.
Trois minutes pour décider d'une solution: démarrer en seconde (Yeah, comme dans Little Miss Sunshine!!!)
Cinq minutes pour essayer avec un homme de cent kilos poussant et moi au volant.
Cinquante secondes pour faire bouger la voiture.
Une minute pour trouver que je ne tourne pas le volant comme il faut.
Trente secondes pour réunir sept hommes qui passaient par là, leur expliquer, et en mettre un au volant à ma place (à votre avis, pouvais-je rire franchement du ridicule absolu de la situation: une jeune fille seule en robe à dos nu qui voyage avec son chat et a besoin de huit hommes pour faire démarrer sa voiture pendant qu'elle reste impuissante sur le bord de la route, ou valait-il mieux prendre un air désolé et reconnaissant?)
Une minute pour faire démarrer effectivement la voiture en seconde.
Quelques minutes pour reprendre possession de ma voiture, et remercier chaleureusement et humblement.

Et c'est ainsi que sous les auspices les plus bordeliques, je pris moins matinalement que prévu le chemin de Girona.

3 commentaires:

  1. ah j'attends à chaque fois avec impatience un nouvel article, et j'avoue que celui-là était pas piqué des vers...très amusant.eve

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  2. cet article m'a beaucoup amusée (désolée, c'était surement moins drôle sur le coup). j'imagine tellement bien la situation :-D
    vivement tes aventures tchèques !!!

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  3. Tout à fait d'accord avec Lilie: ça devait paraître moins drôle sur le coup, mais c'est très amusant raconté comme ça!

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