mardi 31 mars 2009

Mais que fait la police?


Debout au bord de la route qui longe la rivière Matapédia, je suis sur la rive québécoise (de l'autre côté de la rive, c'est le New Brunswick, ou le Nouveau Brunswick, puisque c'est la seule province officiellement bilingue du Canada) à regarder passer les voitures, le pouce levé et ma pancarte "Matane" gribouillée à la va-vite.
Je me livre à une gymnastique facilement ridicule: manger une banane écrasée d'une main, garder un beau sourire plein de pulpe de banane, pour les voitures, et tenir la pancarte avec la seconde et dernière main.
Je suis partie à 7h du matin de la banlieue de Miramichi. J'essaie d'arriver à temps à Matane pour prendre le bateau pour Godbout ou Baie Comeau (de l'autre côté du Saint Laurent, parce que à la nage, c'est vaguement hardcord). Je ne sais pas si mon pouce a l'air stressé à l'idée de ne pas arriver à l'heure, mais les voitures n'ont pas l'air convaincues qu'elles vont faire une bonne affaire si elles se chargent de la petite montagne de sacs et de manteaux qui se barbouille de banane sur le bord de la route. Et puis comme il fait beau, elles ne se donnent même pas la peine de ralentir pour montrer qu'elles ont mauvaise conscience de me laisser prendre racine. Le temps passe et je commence à me demander sincèrement s'il y a un problème: ai-je plus que de coutume l'air d'une junkie? suis-je particulièrement mal placée? Pourtant, ce n'est pas un tournant, ce ne sont pas des zébras, la vue est dégagée, il a y a un large bas-côté pour s'arrêter confortablement... Ce n'est quand même pas ma banane écrasée qui fait fuir?
La réponse à ma question apparaît sous forme d'une voiture de police en vadrouille. Quand je la vois arriver, tout doucement, je range mon bout de banane écrasé, et j'arrête complètement de bouger, histoire de ressembler le plus possible à un poteau électrique. Il faut croire que je ne suis pas encore au point dans l'art de devenir un poteau à volonté, parce que la voiture de police freine de plus en plus, et s'immobilise à côté de moi.
M. Police: "Salut, tu vas où?
Moi: A Matane.
M.Police: c'est pas clair sur ton panneau, on voit pas bien.
Moi: Ouais, je sais, mon crayon est mort pendant que je faisais la pancarte.
M.Police: Ouais, mais comme ça, personne va s'arrêter, là.
Moi: Ben vous auriez pas un crayon ou un stylo, alors, s'il vous plaît?
M.Police: si, bien sûr, attends."

M.Police sort un stylo de sous un fauteuil et me le tend. Je me dépêche de mettre en relief les lettres trop pâles, mais M.Police ajoute:
" Nan, mais prends ton temps."

Quand je lui ai rendu son stylo, M. Police m'a souhaité bonne chance et a crissé son camp, relax, banal, ordinaire...

Grâce à M.Police, deux minutes plus tard, un camion s'arrêtait.

Donc pour ceux qui se posaient la question: oui, l'auto-stop est officiellement permis au Québec, pour ne pas dire encouragé.

1 commentaire:

  1. Génial ! Ce qui est surtout formidable c'est qu'ils auraient pu te prendre en stop (la claaaaasse) ça aurait été plus rapide pour tout le monde, mais non, juste le stylo !
    Et c'est cool hein de monter en camion, moi j'adore :)

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